Le vent

Est-ce que nous voyons la cent millième partie de ce qui existe ? Tenez, voici le vent, qui est la plus grande force de la nature, qui renverse les hommes, abat les édifices, déracine les arbres, soulève la mer en montagnes d’eau, détruit les falaises, et jette aux brisants les grands navires, le vent qui tue, qui siffle, qui gémit, qui mugit, – l’avez-vous vu, et pouvez-vous le voir ? Il existe, pourtant.

Guy de Maupassant

3 commentaires sur “Le vent

  1. Le vent

    Sur la bruyère longue infiniment,
    Voici le vent cornant Novembre ;
    Sur la bruyère, infiniment,
    Voici le vent
    Qui se déchire et se démembre,
    En souffles lourds, battant les bourgs ;
    Voici le vent,
    Le vent sauvage de Novembre.

    Aux puits des fermes,
    Les seaux de fer et les poulies
    Grincent ;
    Aux citernes des fermes.
    Les seaux et les poulies
    Grincent et crient
    Toute la mort, dans leurs mélancolies.

    Le vent rafle, le long de l’eau,
    Les feuilles mortes des bouleaux,
    Le vent sauvage de Novembre ;
    Le vent mord, dans les branches,
    Des nids d’oiseaux ;
    Le vent râpe du fer
    Et peigne, au loin, les avalanches,
    Rageusement du vieil hiver,
    Rageusement, le vent,
    Le vent sauvage de Novembre.

    Dans les étables lamentables,
    Les lucarnes rapiécées
    Ballottent leurs loques falotes
    De vitres et de papier.
    – Le vent sauvage de Novembre ! –
    Sur sa butte de gazon bistre,
    De bas en haut, à travers airs,
    De haut en bas, à coups d’éclairs,
    Le moulin noir fauche, sinistre,
    Le moulin noir fauche le vent,
    Le vent,
    Le vent sauvage de Novembre.

    Les vieux chaumes, à cropetons,
    Autour de leurs clochers d’église.
    Sont ébranlés sur leurs bâtons ;
    Les vieux chaumes et leurs auvents
    Claquent au vent,
    Au vent sauvage de Novembre.
    Les croix du cimetière étroit,
    Les bras des morts que sont ces croix,
    Tombent, comme un grand vol,
    Rabattu noir, contre le sol.

    Le vent sauvage de Novembre,
    Le vent,
    L’avez-vous rencontré le vent,
    Au carrefour des trois cents routes,
    Criant de froid, soufflant d’ahan,
    L’avez-vous rencontré le vent,
    Celui des peurs et des déroutes ;
    L’avez-vous vu, cette nuit-là,
    Quand il jeta la lune à bas,
    Et que, n’en pouvant plus,
    Tous les villages vermoulus
    Criaient, comme des bêtes,
    Sous la tempête ?

    Sur la bruyère, infiniment,
    Voici le vent hurlant,
    Voici le vent cornant Novembre.
    Émile VERHAEREN

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.