L’envie

Je n’envie personne. La richesse, le talent, le succès, la gloire de mon prochain et du moins proche en m’affligent pas, je suis capable d’admiration, capable d’applaudir, de crier vivat, de porter en triomphe, et j’aime le faire. Le succès d’un ami est le mien, il n’est pas nécessaire que ce soit un ami, il suffit que ce soit un compatriote, un Bahianais, un Brésilien, et puis pas même parfois, il suffit que je lui découvre un talent, une vocation. Je me réjouis de découvrir un poète, un jeune romancier, un débutant doué d’une inspiration véritable, je cours annoncer l’événement. Insensible à l’envie, je suis libre pour l’admiration et l’amitié, quelle merveille ! Rien de plus triste que quelqu’un qui souffre du succès des autres, qui est esclave de la négation et de l’amertume, qui bave d’envie, qui patauge dans le dépit, le malheureux.
Jorge Amado

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