Ecrire, ma tanière

Ecrire est la tanière que je transporte partout. Quand je m’imagine dans une situation ou un endroit où je suis mal à l’aise ou bien paniquée, je pense que je pourrais toujours sortir mon petit cahier et me réfugier dans l’autre monde, et que là, je serais bien.

Milena Agus

Dans l’eau du temps

Dans l’eau du temps qui coule à petit bruit,
Dans l’air du temps qui souffle à petit vent,
Dans l’eau du temps qui parle à petits mots
Et sourdement touche l’herbe et le sable ;
Dans l’eau du temps qui traverse les marbres,
Usant au front le rêve des statues,
Dans l’eau du temps qui muse au lourd jardin,
Le vent du temps qui fuse au lourd feuillage
Dans l’air du temps qui ruse aux quatre vents,
Et qui jamais ne pose son envol,
Dans l’air du temps qui pousse un hurlement
Puis va baiser les flores de la vague,
Dans l’eau du temps qui retourne à la mer,
Dans l’air du temps qui n’a point de maison,
Dans l’eau, dans l’air, dans la changeante humeur
Du temps, du temps sans heure et sans visage,
J’aurai vécu à profonde saveur,
Cherchant un peu de terre sous mes pieds,
J’aurai vécu à profondes gorgées,
Buvant le temps, buvant tout l’air du temps
Et tout le vin qui coule dans le temps.

Norge

Prendre des risques

Il faut tout espérer, au risque d’être déçu. Il faut tout éprouver au risque d’être blessé, tout donner au risque d’être volé. Ce qui vaut la peine d’être vécu vous met forcément en danger.

Gilles Legardinier

Les grands livres de ma vie

Dans l’ordre des souvenirs, l’amour de la littérature a une grande supériorité sur l’amour tout court, l’amour humain. C’est que si l’on ne se rappelle pas forcément où et quand on a rencontré « l’autre », si on ne sait pas forcément quel effet « il » vous fit ce jour-là – et si on a même plutôt tendance souvent à s’extasier de ce que, ce soir-là, on ne comprit pas tout de suite que l’autre, c’était justement « lui » -, la littérature en revanche offre à notre mémoire des coups de foudres autrement fracassants, précis et définitifs. Je sais très bien où j’ai lu, où j’ai découvert les grands livres de ma vie ; et les paysages extérieurs de ma vie alors sont là, inextricablement liés à mes paysages internes qui sont généralement ceux de l’adolescence.

Françoise Sagan