Plus jamais je ne refermerai une porte, jeté comme un objet, poussé comme un pion par des valets, tartuffes, des êtres sans morale. J’étais déterminé à remonter la pente et, effaré à l’idée d’être chômeur, je décidai d’une retraite intérieure. Cet isolement dura une année. Durant quelques mois, je ne parvenais pas à me délivrer de cette colère qui envahissait et entaillait mon corps. Puis la transformation s’opéra. Je conserve trois mille fiches bristol sur lesquelles je notais tout ce que j’entreprenais. Je détaillais mes failles, mes atouts. Je divisais ma vie en périodes, saturées d’aventures, de rencontres et j’analysais chaque circonstance. Je m’astreignais surtout à changer ma vie. Le monde était envahi de scélérats, de vautours qui s’arrogeaient le droit de nous priver soudain de notre emploi. Aussi je renonçai à retrouver un travail, dans un tel système. Trente ans plus tard précisément, la porte d’un théâtre s’ouvre. Je vais monter sur scène et rendre les coups. L’écriture me procure cette liberté. Il n’y a pas de censure. Tant que je pourrai écrire, tant que les spectateurs seront là, même peu nombreux, ma vie ne sera pas morose.
Didier