Né de l’écriture

Je commençais à me découvrir. Je n’étais presque rien, tout au plus une activité sans contenu, mais il n’en fallait pas davantage. J’échappais à la comédie : je ne travaillais pas encore mais déjà je ne jouais plus, le menteur trouvait sa vérité dans l’élaboration de ses mensonges. Je suis né de l’écriture : avant elle, il n’y avait qu’un jeu de miroirs ; dès mon premier roman, je sus qu’un enfant s’était introduit dans le palais de glaces. Écrivant, j’existais, j’échappais aux grandes personnes ; mais je n’existais que pour écrire et si je disais : moi, cela signifiait : moi qui écris. N’importe : je connus la joie ; l’enfant public se donna des rendez-vous privés.

Jean-Paul Sartre

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