Ecrire est une étrange combinaison d’allégresse et d’angoisse. (…) Les mots m’arrivaient tout seuls. Ils coulaient de source. Ils ne venaient même pas de moi. Ils venaient d’ailleurs. Ils me traversaient. Ils se servaient de moi pour se coucher sur le papier. Ils sortaient je ne sais d’où et ils volaient jusqu’à moi. Un grand bonheur m’envahissait. Il me payait de mes attentes et de mes découragements. J’avançais ainsi lentement entre illuminations et chagrins, transporté sur les sommets, effondré dans l’abîme, dormant sur mes échecs et sur mes découvertes, rêvant la nuit à des mots qui brillaient comme des éclairs et que j’avais du mal à retrouver le matin.
Jean d’Ormesson