A l’heure où les textes semblent domestiqués, mis en boîte, mis en page automatiquement par ordinateurs interposés, les manuscrits vous disent encore le souffle, le signe, la preuve écrite du fait que des hommes et des femmes ont créé, ont aimé, ont souffert et vécu en confiant à la page blanche les hésitations, les repentirs, les élans, les plaisirs et les tristesses, les ratures de la petite musique de l’âme humaine. Ils vous diront que seule l’écriture retrace les étapes successives de la création, la respiration, la pensée de l’auteur, le geste de sa main, les détours de ses repentirs. (…)
Les grands manuscrits de notre littérature vous diront l’incroyable finesse du pinceau des enlumineurs du Moyen Age, capables de peindre des paysages en miniature avec des sujets, de deux centimètres sur trois, si fins qu’ils supportent aujourd’hui l’agrandissement au format des publicités du métro…
Ils vous diront que l’homme vêtu de son pourpoint et de ses poulaines savait combiner, pour créer ses encres et ses teintes, le règne animal, le règne végétal, le règne minéral et le règne humain : il utilisait des couleurs fabriquées avec de la pierre écrasée, des plantes pilées, des cuirs macérés…
(…) Ils vous diront encore les phrases enflammées de George Sand, les paperoles de Proust, la seine d’Apollinaire, le papier bleu de Colette, les calligrammes de Cocteau… (..)
Vous comprendrez alors qu’un texte prend ses racines dans son manuscrit original; que ce livre n’avait pas pour objet de bâtir un panthéon, un dictionnaire de l’académisme littéraire, mais tout simplement de vous inciter à penser que si l’homme a mis plus de cinq millions d’années pour apprendre à écrire et pour dérouler jusqu’à vous la longue chenille de l’écriture, c’était pour mieux vous apporter à travers ses manuscrits originaux, à travers cette poussière d’étoiles, cette poussière de Graal qui teinte son encre et les mots qu’il enchaîne, la vibration, l’émotion de sa vie, de sa langue, et de sa culture.
Ils vous diront que l’homme vêtu de son pourpoint et de ses poulaines savait combiner, pour créer ses encres et ses teintes, le règne animal, le règne végétal, le règne minéral et le règne humain : il utilisait des couleurs fabriquées avec de la pierre écrasée, des plantes pilées, des cuirs macérés…
(…) Ils vous diront encore les phrases enflammées de George Sand, les paperoles de Proust, la seine d’Apollinaire, le papier bleu de Colette, les calligrammes de Cocteau… (..)
Vous comprendrez alors qu’un texte prend ses racines dans son manuscrit original; que ce livre n’avait pas pour objet de bâtir un panthéon, un dictionnaire de l’académisme littéraire, mais tout simplement de vous inciter à penser que si l’homme a mis plus de cinq millions d’années pour apprendre à écrire et pour dérouler jusqu’à vous la longue chenille de l’écriture, c’était pour mieux vous apporter à travers ses manuscrits originaux, à travers cette poussière d’étoiles, cette poussière de Graal qui teinte son encre et les mots qu’il enchaîne, la vibration, l’émotion de sa vie, de sa langue, et de sa culture.
Jean-Pierre Guéno
Ce texte est magnifique ! Merci à vous Didier de nous l’avoir fait découvrir ….
Je vous en prie.