L’histoire

Désespoir. L’histoire ne va nulle part. Elle avance peut-être, en tous cas elle bouge, mais n’a d’autre but, à chaque instant, que le pas (à supposer que ses mouvements innombrables, infimes ou grandioses, puissent, dans leur contemporanéité dispersée, se réduire à l’unité d’un pas) qu’elle effectue. En avant ? En arrière ? C’est selon votre point de vue, et l’orientation de vos désirs. Car l’axe temporel ne suffit pas : on peut faire un pas en avant vers le passé (Platon, nous le verrons, ne voulait pas autre chose), ou un pas en arrière vers l’avenir : c’est le propre des décadences. Il n’y a d’avant et d’arrière que ce que l’on définit tel, et par conséquent de progrès ou de recul que relatifs. Il n’est en effet aucun point de repère absolu ou fixe pour en juger et pas de fin dernière. Labyrinthe : l’histoire n’avance jamais que vers elle-même.

André Comte-Sponville

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