Je défais dans mes mains toutes les chevelures
Le jour a les couleurs que lui donne mes mains
Tout ce qu’enfle un soupir dans ma chambre est voilure
Et le rêve durable est mon regard demain
Toute fleur d’être nue est semblable aux captives
Qui font trembler les doigts par leur seule beauté
J’attends je vois je songe et le ciel qui dérive
Est simple devant moi comme une robe ôtée
J’explique sans les mots le pas qui fait la ronde
J’explique le pied nu qu’à le vent effacé
J’explique sans mystère un moment de ce monde
J’explique le soleil sur l’épaule pensée
(…)
J’explique le parfum des formes passagères
J’explique ce qui fait chanter le papier blanc
J’explique ce qui fait qu’une feuille est légère
Et les branches qui sont des bras un peu plus lents
Je rends à la lumière un tribut de justice
Immobile au milieu des malheurs de ce temps
Je peins l’espoir des yeux afin qu’Henri Matisse
Témoigne à l’avenir ce que l’homme en attend.
Louis Aragon