L’aliénation la plus grande est aussi ce qui peut conduire, si quelque barrière cède, à la plus extrême poésie.
Yves Bonnefoy
Mois : septembre 2016
La page blanche
Quand l’âme est un violon, la page blanche s’exaspère.
Didier Celiset
Décider de sa vie
J’aimerais avoir la chance de décider de ma vie, je crois que c’est le plus grand cadeau qui puisse nous être fait. Décider de sa vie.
Grégoire Delacourt
Prononcer son nom
Au fil de toutes ces années passées à collectionner les mots, j’ai constaté une chose : on peut très souvent dire combien une personne en aime une autre à la façon dont elle prononce son nom. Je crois que c’est un des meilleurs sentiments au monde, lorsqu’on sait que son nom est en sécurité dans la bouche de quelqu’un d’autre ; lorsqu’on sait qu’il ne le criera jamais comme un juron, mais le prononcera ou le chuchotera comme un Il était une fois.
Saci Lloyd
Chambres de nos âmes
Les mots peuvent-ils avoir des ailes ? Peuvent-ils scintiller dans l’air comme des papillons ? Peuvent-ils nous emporter, captifs, dans un autre monde ? Peuvent-ils ouvrir les ultimes chambres secrètes de nos âmes ?.
Jan-Philipp Sendker
Regarder loin
Regarder l’horizon, c’est regarder loin, mais c’est aussi regarder quelque chose de faux.
Jules Renard
La vie
La vie c’est du vent Qui nous souffle les rêves d’enfant.
Marc Lavoine
L’écriture est une anatomie
Je n’écris pas une histoire mais une langue, je n’écris pas une situation mais une forme, je n’écris pas des personnages mais des langages, je n’ai pas besoin de sentiments, d’anecdotes d’amour, je veux des puissances, des mots ajustés, des possessions, des folies, des guérisons, je veux des volumes pas des décors, pas des déguisements, pas des costumes, je me fous de la narration, de la progression, je marche dans la boue, je tombe à genoux, je frappe au cœur, chaque mot est une découverte, une horreur, une solitude, deux mots sont un miracle, les recherches interrogent, soulèvent le sujet, l’écorchent, l’écriture est une anatomie, elle sort chaque organe, le pèse, soupèse, le dissèque, je passe des mois à remettre dans ce corps écartelé les organes étudiés, je referme, suture au fil de crin, au fil rouge, au fil noir la peau de mon support, ses poumons remplis d’eau et de pierres, tant qu’il ne respire pas je ne respire plus, nous supprimons l’air entre les mots, il n’y a rien de plaisant à me lire, rien de confortable, rien de réconfortant, la langue s’essuie au regard humide, luisante elle pénètre, s’insinue si bien aiguisée qu’elle scarifie, laisse trace, devient trace.
Perrine Le Querrec
Quelques évidences
Maintenant le principal est fait. Je tiens quelques évidences dont je ne peux me détacher. Ce que je sais, ce qui est sûr, ce que je ne peux nier, ce que je ne peux rejeter, voilà ce qui compte. Je peux tout nier de cette partie de moi qui vit de nostalgies incertaines, sauf ce désir d’unité, cet appétit de résoudre, cette exigence de clarté et de cohésion. Je peux tout réfuter dans ce monde qui m’entoure, me heurte ou me transporte, sauf ce chaos, ce hasard roi et cette divine équivalence qui naît de l’anarchie. Je ne sais pas si ce monde a un sens qui le dépasse. Mais je sais que je ne connais pas ce sens et qu’il m’est impossible pour le moment de le connaître.
Camus (Le Mythe de Sisyphe)
Consolations de la chair
J’apprécie les consolations de la chair. Je n’ai aucune patience envers les âmes lâches qui nomment cela faiblesse. Je dis : jouir est une prouesse.
Bertolt Brecht (La vie de Galilée)